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Expo

Designing Dreams, a celebration of Leon Bakst

Du dimanche 23 octobre 2016 au dimanche 15 janvier 2017 de 11h à 19h

Villa Sauber, Nouveau Musée National de Monaco

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Villa Sauber, Nouveau Musée National de Monaco

6 €

de 11h à 19h

« Designing Dreams, A Celebration of Leon Bakst », conçue en collaboration avec le Professeur John E. Bowlt de l’University of Southern California et en association avec de nombreux chercheurs et prêteurs internationaux, est une exposition organisée autour des collections du Nouveau Musée National de Monaco et du dépôt permanent de la Société des Bains de Mer.

Leon Bakst (né en 1966 à Grodno – actuellement Biélorussie – et mort à Paris en 1924 ) est principalement connu et célébré pour les décors et les costumes chamarrés qu’il conçut pour la compagnie des Ballets Russes à Paris, Londres et Monte-Carlo, au cours des années 1910 et au début des années 1920. Ses réalisations éblouissantes ont participé au triomphe mondial de spectacles emblématiques tels que Schéhérazade, Le spectre de la Rose, Narcisse, L’Après-midi d’un Faune, Daphnis et Chloé, Le Dieu Bleu, ou encore La Belle au Bois Dormant. Puisant son inspiration dans les cultures antiques de la Grèce, de la Perse et du Siam autant que dans l’art populaire russe, Leon Bakst a opéré une synthèse entre l’art de l’Orient et le Modern Style.

Considérant le théâtre comme une œuvre totale dans laquelle chorégraphie, musique, costumes et décors étaient d’une importance égale, et travaillant en étroite collaboration avec des artistes comme Serge Diaghilev, Vaslav Nijinsky, Jean Cocteau, Isadora Duncan, Ida Rubinstein et Igor Stravinsky, Bakst a transformé la perception du ballet.

L’exposition « Designing Dreams, A Celebration of Leon Bakst » met en lumière les plus belles réalisations de Bakst pour la scène, mais elle entend aussi démontrer son influence décisive dans le domaine du design textile. Répondant à l’invitation du NMNM, le plasticien et chorégraphe contemporain Nick Mauss s’est inspiré des maquettes de tissus imprimés dessinées par Bakst dans les années 1922-1924, pour concevoir un décors monumental déployé dans les espaces de la Villa Sauber, comme une évocation et un hommage à l’exubérance des œuvres de Bakst.

Enfin, l’influence des créations de Bakst dans la mode fait l’objet d’une présentation exceptionnelle de plusieurs modèles accessoirisés d’Yves Saint Laurent ainsi que des planches de la collection Saint Laurent – rive gauche de 1991, directement inspirée par les dessins et costumes de Schéhérazade.

L’exposition « Designing Dreams, A Celebration of Leon Bakst » présente plus de 150 dessins, maquettes et costumes de scène, dans un parcours inédit inspiré par le rêve, documenté par de nombreuses archives d’époques et ponctué par les œuvres d’artistes tels que Jean Cocteau, Valentine Hugo ou encore George Barbier, ayant contribué à la diffusion du fameux « Art décoratif de Leon Bakst ».

Je tourne le dos à l’hôtel et en reste baba : un précipice gigantesque, sans fond dans la nuit, tout près de mes pieds… quelque part, tout en bas dans la vallée, sous les éclairs aveuglants bleu-mauve, reposent les temples blancs de marbre - maisonnettes de conte tombées en poussière entre les mains monstrueuses des Cyclopes… Est-ce par colère qu’ils les jetèrent des montagnes verticales et lugubres qui entourent, de leur chœur malveillant, le hardi sanctuaire blanc ?

En fendant impérieusement les ténèbres, les volées d’aigles géants planent, inquiets, en traçant des courbes impétueuses dans toutes les directions ; dans l’air épais, étouffant, plein de phosphore et d’électricité, on entend de trop près, juste sous nos pieds, le bruissement affreux de leurs ailes robustes…

Je m’éloigne involontairement du précipice… L’ombre de Ganymède glisse craintivement dans ma pensée… Le fracas assourdissant et le scintillement sont si forts, qu’il semble que l’éclair nous transperce tout entier - nous tenons à peine debout. Instinctivement nous nous tournons du côté de la trattoria et son air simple d’opéra atténue l’acuité de nos sentiments…
 

Serov affirme qu’il a faim ; je sens une sorte de reconnaissance pour ce revirement vers le banal besoin quotidien ; dans la salle qui comporte une table proprement dressée, parmi les bouteilles noires, mon œil ascétique remarque avec satisfaction des œufs durs posés sur un monticule de sel gris, plusieurs fromages frais et une assiette d’amandes et de raisins secs.

Quel plaisir de dîner sous le bas plafond blanc, de s’essuyer avec des serviettes propres brodées aux tons vifs, de siroter, avec du vin âpre, une somnolente conversation culinaire à propos des repas montagnards, du fromage de chèvre, bien meilleur que le fromage hollandais que l’on servait avec du pumpernickel sec chez Leiner à Pétersbourg . Ô, ce restaurant de Leiner !

Sentimental, je me répands au sujet de la vieille et respectable madame Leiner, grosse veuve violette d’apoplexie, au sujet de ses dîners classiques pour un rouble d’argent - restaurant dans lequel nous étions d’honorables habitués de longue date.

– Certes, honorables ! Tu te souviens quand elle nous a offert à chacun un authentique petit verre d’argent en signe de notre fidélité décennale ? Tu te souviens ? Tu te souviens quelle bière munichoise étonnante on y servait ? Noire, épaisse… et les Allemands de chez Leiner - quel drôle de peuple !
– « Kannst-du noch , Androuchcha ?
– Absoluuuuument ! »
Serov rit avec bonhomie, allume pensivement son cigare. De Delphes, de l’orage - on ne dit pas mot.

Mais avant de me coucher, tel le duc de la cavatine de Rigoletto, dans ma chambre minuscule et étouffante, j’ouvre largement la fenêtre qui, elle, n’est pas de théâtre.

L’orage grandit et se renforce. Par moment le vent romantique se calme et le silence lourd, précurseur d’un épique fracas assourdissant, devient insupportable, comme le spasme d’un enfant qui, juste après une chute, se tait pendant trois horribles secondes et tout à coup déchire l’air de son cri frénétique et, néanmoins, quelque peu apaisant.

De larges éclairs coupent sans cesse l’œil avec leur rasoir géant ; le précipice sans fond sous la fenêtre paraît alors encore plus velouté et sauvage.

Il y a un cauchemar atroce, véritable torture dans lequel tu n’arrêtes pas de tomber d’une hauteur effroyable dans une profondeur noire et inconnue, et ton corps est titillé jusqu’à la nausée par le sentiment de l’absence de sol sous tes pieds… Ce que je ressentais en me forçant à tenir bon contre l’orage devant la fenêtre ouverte était proche de ce cauchemar : ce chatouillement, le frère de la mort, s’approchait de moi…

Quel étrange, quel terrible décor !... Tout autour, sur les rochers, comme dans un colisée des Cyclopes, comme dans une volière magique faite pour des aigles géants, bâillent des trous profonds et noirs, des niches - sépultures abandonnées des pèlerins de l’Hellade et de l’Étrurie, des tombeaux des philosophes, des pontifes ayant vécu, étudié, professé près du sanctuaire glorieux.

Depuis longtemps se putréfièrent les ossements des stoïciens et des sophistes, bâtisseurs de systèmes ingénieux, chercheurs du sens de l’existence… Mais toujours, comme il y a trois mille ans, au printemps, Zeus tonne au milieu de la volée d’aigles effrayés par les éclairs et, chaque printemps, dans les ténèbres de l’Hadès, Perséphone pétrifiée de douleur - torve, terrible, assise dans son profond fauteuil de basalte - attend chez elle avec méchanceté, de la terre interdite et florissante, les enfants du soleil crédules et fragiles : les hommes…

Léon Bakst

Léon Bakst

Peintre russe, il devient en 1898 l’un des fondateurs avec Diaghilev du mouvement Le Monde de l’Art.

Il expose à Paris, à la Galerie nationale, et est chargé de l'aménagement décoratif de l'exposition russe au Salon d'automne en 1908.

Il devient, dès leur naissance, le collaborateur privilégié des Ballets russes, pour lesquels il réalise costumes et décors jusqu’en 1921.

Sa page wikipedia

Olga Medvedkova

Olga Medvedkova

Olga Medvedkova est historienne de l’art et écrivain. Née à Moscou, elle vit en France depuis 1991 et choisit d'écrire en français. Directrice de recherche au CNRS, elle est auteur de nombreux ouvrages d’histoire de l’art et de l’architecture, d'essais, de nouvelles, de contes et de deux romans : L’Education soviétique (le prix Révélation 2014 de la SDGL) et Les Anges stagiaires.
En 2017 elle a reçu le prix Lequeux de l’Institut de France pour l’ensemble de son œuvre.

Son site : olgamedvedkova.blog4ever.net

Sa page Facebook

podcast Écoutez l'interview de Olga Medvedkova sur francefineart.com.

DANSE - Janvier 2017

presse

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